Les Affinités. Robert Charles Wilson

Retour en fanfare pour la collection Lunes d’Encre, de Denoël, qui n’avait plus sorti de nouveaux titres depuis octobre 2015, avec un nouveau roman de Robert Charles Wilson, toujours un événement.

Les Affinités sont des groupes de gens mis en relation par une société commerciale, à partir des résultats de tests que l’on passe volontairement. Ces tests classent les gens en 22 catégories, en réalité 23, puisqu’il arrive qu’on ne puisse être classé dans aucune d’entre elles. On ne peut à ce moment-là intégrer aucune Affinité.

Adam, le personnage principal du roman passe le test à un moment difficile de sa vie. Il va être obligé d’arrêter ses études qui étaient financées par sa grand-mère, lorsque celle-ci tombe malade, et retourner vivre chez ses parents, avec qui il n’est pas en bons termes. Mais il réussit le test, et intègre une « tranche », un groupe d’une trentaine de personnes appartenant tous à la même Affinité. C’est une révélation pour lui. Il trouve un lieu où règne la bienveillance, où il se sent compris comme jamais il ne l’a été. Il se rend compte qu’il a trouvé ce qu’il cherchait depuis toujours sans jamais réussir à le formuler. Et, en plus du relationnel, il trouve aussi dans ce « système » des solutions à ses problèmes financiers. Le principe des Affinités va se développer dans les années qui viennent, jusqu’à interférer sur la géopolitique mondiale. Le roman se déroule sur plusieurs années, durant lesquelles on suit en parallèle l’évolution de la vie d’Adam et le déploiement du système des Affinités dans le monde entier.

On retrouve dans Les Affinités toutes les qualités des meilleurs romans de Robert Charles Wilson. L’humanisme, les personnages attachants, et cette touche de mélancolie déjà présente des Spin ou Blind Lake. Wilson me semble pessimiste sur la nature humaine, mais optimiste sur le fait que certains d’entre nous peuvent se dépasser et faire en sorte qu’il reste une chance d’éviter le chaos. Il l’illustre à nouveau avec ce roman. Au passage, il règle son compte, au travers d’Adam, à la cellule familiale présentée comme fortement toxique (ce qui n’est pas nouveau pour l’auteur, la figure du père tyrannique et vexatoire était déjà présente dans Spin).

Le concept des Affinités me semble très original. On a tous des raisons différentes d’aimer la science-fiction. Certains mettent en avant le fameux « sense of wonder », l’émerveillement devant le voyage dans l’espace ou la découverte d’une vie extraterrestre. Je n’y suis pas insensible non plus, mais je crois qu’au fond, ce qui me plaît le plus dans la SF, c’est le brassage d’idées nouvelles. Et, à ce titre, Les Affinités est pour moi la quintessence de ce que j’aime dans la SF.

Pour ne rien gâcher, Wilson nous a évité la tendance à l’embonpoint dans laquelle se vautrent certains. Le roman est assez court, au bénéfice du rythme.

Une toute petite réserve, qui je pense, vient de la traduction : le texte manque parfois d’élégance. Certaines formules sonnent mal, certaines phrases n’en finissent pas, les conjonctions sont parfois bizarres. Je n’ai pas lu le texte en VO, et du reste, je ne crois pas avoir la capacité de juger de l’élégance d’un texte anglais. Mais, par exemple « son sixième sens à gays » (p260), c’est juste pas possible !

Cette réserve ne doit en rien être un obstacle à la lecture de ce très grand roman, dans lequel Robert Charles Wilson déploie toutes les qualités qu’on aime chez lui, tout en sortant de sa zone de confort en explorant un thème très original.

Roman traduit de l’Anglais (Canada) par Gilles Goullet
Paru chez Denoël Lunes d’Encre

Ce contenu a été publié dans Livres, avec comme mot(s)-clé(s) , , , . Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

3 réponses à Les Affinités. Robert Charles Wilson

  1. Cédric dit :

    Je le mets sur mes tablettes… Et je ne lirai pas la page 260 !

  2. Phil dit :

    Je le lis bientôt (enfin, quand je l’aurai acheté, semaine prochaine – si je suis plus malade) !
    Et je me forcerai à lire toutes les pages…

Les commentaires sont fermés.