L’incolore Tsukuru Tazaki et ses années de pèlerinage. Haruki Murakami

Après l’énorme succès de 1Q84, Haruki Murakami nous revient avec un roman moins long, ce qui est heureux, 1Q84 étant parfois un peu trop délayé.

L’incolore Tsukuru Tazaki et ses années de pèlerinage est un titre qui ne trompe pas sur la marchandise. Le roman se divise en deux parties : dans la première, on fait connaissance avec Tsukuru Tazaki. Lorsqu’il était lycéen, il avait quatre amis très proches. Chacun d’eux avait un prénom qui évoquait une couleur (en japonais) : bleu et rouge pour les deux garçons ; blanche et noire pour les deux filles. Lui seul n’avait pas de couleur dans son prénom. Puis, un jour, sans qu’il comprenne pourquoi, ses amis ne voulurent plus le voir. Pendant les six mois qui ont suivi, Tsukuru Tazaki a traversé une sévère dépression qui l’a amené à frôler la mort. Il finit par se lier d’amitié avec un garçon plus jeune que lui, qui va lui aussi disparaître de sa vie sans crier gare. Enfin, seize années après, il rencontre une fille, Sara dont il tombe amoureux. Celle-ci le convint de partir à la recherche de ses quatre amis pour comprendre ce qui s’est passé. Cette quête est l’objet de la deuxième partie du livre.

Haruki Murakami a mis dans ce livre tous ces thèmes de prédilection : la nostalgie, le vide, le quotidien, la frontière floue entre raison et folie. Ce roman-ci me semble cependant bien plus sombre que tous les autres. On pourra lui reprocher de ne pas avoir fait preuve d’une très grande originalité, mais je suis tombé complètement sous le charme. L’auteur a réussi à écrire un livre assez similaire à ses meilleurs, tout en se renouvelant complètement. Le cadre est connu ; la « mécanique », la poésie, les personnages archétypaux aussi. Mais ces ingrédients jouent une nouvelle partition, et pour ma part, j’ai totalement adhéré. Je n’ai pas réussi à lâcher le livre avant de l’avoir terminé.

J’ai du mal à décrire pourquoi j’aime Murakami, parce que ce n’est pas un processus intellectuel. Son écriture me touche vraiment très profondément. Ses personnages un peu lunaires, absents à tout, y compris à eux-mêmes me remuent les tripes. 1Q84 pouvait laissait craindre qu’une certaine froideur ne s’installe dans l’écriture de l’auteur. Me voilà rassuré.

La structure du roman peut sembler assez similaire à nombre de ses romans, pourtant, il y a quelque chose qui change selon moi : de nombreuses pistes sont laissées ouvertes, et sans raconter la fin, on peut dire qu’elle est aussi totalement ouverte. C’est parfois frustrant. En l’espèce, ça m’a beaucoup plu, me donnant l’impression de rester encore dans cet univers, bien longtemps après avoir refermé le bouquin.

(S’il vous plait, Monsieur ou Madame Belfond, vous voulez pas éditer les deux premiers romans de l’auteur, encore inédits en France ?)

Document traduit de l’Anglais (donc…) par Dominique Letellier
Paru aux Éditions Belfond

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