Sortir du cadre

Connaissez-vous l’énigme des neufs points ? Il s’agit de relier les neuf points de la figure ci-dessous avec quatre lignes droites, sans jamais lever le crayon.

La difficulté de l’énigme tient au fait que, sans que ce soit énoncé, on présuppose qu’il faille rester dans le cadre des neuf points. Or, la solution est la suivante :

il faut sortir du cadre.

Ce petit casse-tête illustre parfaitement le logiciel qui régit le cerveau de nos dirigeants politiques (et économiques). Leur éventail de solutions ne sort jamais du cadre, alors qu’aujourd’hui les problèmes sont tels qu’ils nécessitent d’envisager d’autres solutions que celles appliquées sans succès depuis des décennies.

Je crois que l’équipe dirigeante nouvellement arrivée au pouvoir en France n’est pas bien conscience de cette nécessité de sortir du cadre.

Par exemple, le regard de la France sur la situation grecque est absolument dramatique. Le message envoyé par François Hollande aux Grecs est consternant.

(extrait du discours de Hollande à la télé grecque la semaine précédent leur scrutin législatif de 17 Juin :
« Mais je dois les prévenir, parce que c’est mon devoir, parce que je suis un ami de la Grèce, que si l’impression est donnée que les Grecs veulent s’éloigner des engagements qui ont été pris et abandonner toute la perspective de redressement, alors il y aura des pays dans la zone Euro qui préféreront en terminer avec la présence de la Grèce dans la zone Euro. Donc je préfère le dire parce que c’est le langage de la vérité. Moi, je ne suis pas sur cette position, je suis pour que la Grèce reste dans la zone Euro. »
).

À mots couverts, il indique qu’il vaut mieux une coalition composée de la nouvelle Démocratie (centre droit) et du Pasok (centre gauche, équivalent du PS), plutôt qu’un gouvernement mené par la gauche radicale. Dit autrement : faites confiance à ceux qui vous ont mené dans le trou pour vous en sortir. Si ce n’était pas si dramatique, on en rirait. David Assouline, sénateur socialiste, leader de la contestation étudiante en 1986, faut-il le lui rappeler, expliquait, le lendemain du scrutin : »Une coalition de gauche n’est pas une solution quand il y a un tel désastre national… « .
Cette vision de la situation de la Grèce n’est malheureusement qu’une illustration d’un problème bien plus vaste, et qui concerne autant les aspects internationaux que de politique intérieure.

La gauche n’est pas au pouvoir aujourd’hui en France pour se voir accorder un satisfecit de bonne gestion, comme elle l’a fait entre 83 et 86 puis entre 88 et 93 et encore entre 2000 et 2002. Elle n’est pas là non plus pour faire du Sarkozy sans les outrances du Sarkozysme. Elle n’est pas là pour faire le moins de vagues possibles pour s’installer durablement au pouvoir. Si elle succombe à cette dernière tentation, non seulement elle ne conservera pas le pouvoir plus d’une législature, mais elle fera le lit de l’extrême droite.

Il faut avoir un certain courage pour sortir du cadre, pour oser l’aventure de l’inexploré. L’avenir nous dira si le courage fait partie des qualités de l’équipe de François Hollande. Je parie qu’on n’aura pas longtemps à attendre pour le savoir.

(Les deux dessins sont issus du site http://www.funfou.com)

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1 réponse à Sortir du cadre

  1. Phil dit :

    Tiens, c’est « marrant », le coup des 9 points à relier et le fait de « sortir du cadre », je révisais ça il y a quelques jours pour mon oral…
    (je sais, c’est pas très intéressant, mais comme d’hab’, tu as tout dit en peu de mots ! :))

    Je crains en effet qu’on ait un gouvernement qui assure les affaires courantes, sans plus – ce qui serait déjà bien, mais pas suffisant face à la situation.

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