Recherche journaliste désespérément

Y a-t-il encore un journaliste en France ? Honnêtement, après la séquence du jour sur la censure (annoncée trop tôt puis finalement effective) de la loi Duflot sur le logement, on est en droit de se poser la question.

Rapide résumé. Ce matin, Jean-Marc Ayraut annonce à la radio que la dite loi va être censurée par le Conseil Constitutionnel. Immédiatement, les sites internet des grands journaux commentent la censure (la prenant pour acquise). Et ce n’est qu’en début d’après mlidi qu’on va commencer à lire, dans certains articles, que le Conseil ne s’est pas encore prononcé. Finalement, le Conseil se prononce en fin de journée (dans le sens annoncé par Ayraut), et les mêmes journaux ergotent sans fin sur la réprimande supposée de Hollande à son Premier Ministre, mais on ne voit nulle part un début d’enquête sur ce qui s’est passé. Si Ayraut s’est basé sur une analyse de la façon dont a été votée la loi, il est quand même étonnant qu’aucun journaliste ne l’ai faite avant lui ! (Et sur le fond, on peut aussi quand même s’étonner qu’Ayraut n’ait pas fait cette brillante analyse en temps voulu, ce qui lui aurait évité une situation délicate aujourd’hui). Enfin, pour rester dans le même registre, alors qu’Ayraut a anticipé de presque dix heures la censure, on aurait aimé que nos amis journalistes se renseignent sur le sort qui va être fait à cette loi : dans quel délai va-t-elle être représentée au parlement (en bonne forme, cette fois, on peut l’espérer), par exemple ?

Or, à l’heure où j’écris, trente minutes après l’annonce de la décision par le Conseil Constitutionnel : le Monde ne fait même pas état de cette décision, Libération se contente d’une dépêche sur le couac gouvernemental, et Le Figaro fait à peine mieux, en nous expliquant enfin pourquoi cette loi est censurée. Heureusement, le Parisien sauve l’honneur en nous indiquant qu’un nouveau texte serait présenté en conseil des ministres mi novembre, et à l’assemblée dans la foulée. Ça ne nécessitait pas manifestement le travail d’un super enquêteur, puisqu’il semble que Jean Marc Ayraut himself l’ait annoncé ce matin, dans la même intervention que celle où il annonçait avec anticipation la censure du Conseil Constitutionnel. On marche sur la tête.

Je sais bien que les journalistes (enfin, l’immense majorité, ne faisons pas de généralités), qui pensent à notre place, supposent que le public est plus intéressé par l’écume des choses que par le fond. Mais enfin, à ce point là, c’est effarant.

Plutôt que de pleurer sur la baisse des ventes, sur la crise du métier, et autres plaintes habituelles, je crois que les quotidiens d’information français devraient peut être se mettre au boulot, et réfléchir aux conséquences dévastatrices de la course à l’info, qui fait qu’aujourd’hui, il semble plus important de sortir une info en premier que de sortir une info vérifiée, exacte et précise. On a vraiment le sentiment que l’alpha et l’omega de l’info, aujourd’hui, c’est le modèle des chaînes télé d’info en continu, qui abreuvent le public d’info sans aucune analyse, sans aucun recul, au fond, sans aucun sens.

Une fois de plus, le bon exemple vient de la presse en ligne. Mediapart ne s’est pas jeté sur l’ « info » de ce matin, du coup ne s’est pas contredit dix fois dans la journée, et il est probable qu’ils vont prendre le temps de comprendre l’ensemble de l’affaire pour mettre en ligne un article. À suivre, et à méditer !

(Il va falloir que je prenne le temps de me pencher sur le « brillant » bilan de ce gouvernement après preque six mois d’action, mais c’est un peu déprimant, alors, je repousse…)

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1 réponse à Recherche journaliste désespérément

  1. Phil dit :

    « (Il va falloir que je prenne le temps de me pencher sur le « brillant » bilan de ce gouvernement après preque six mois d’action, mais c’est un peu déprimant, alors, je repousse…) »

    En effet… « Déprimant », t’es encore loin de la vérité !

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