Comment s’étonner qu’après avoir été le refrain invariable des équipes au pouvoir depuis 2002, la baisse des impôts soit devenu un acquis évident pour toutes les catégories sectorielles qui en ont bénéficié. C’est devenu une évidence, ça a pénétré notre inconscient collectif : un bon gouvernement doit baisser les impôts. Dès lors, on ne sera pas étonné qu’une semaine après l’annonce du plan de rigueur par Fillon, tous les acteurs influents concernés par les hausses de prélèvement hurlent. Ça a commencé par les députés ayant, dans leur fief, un parc d’attraction (De Villiers, Raffarin…). Ça continue avec les professionnels de l’immobilier qui voient la hausse de la taxation sur les plus values des résidences secondaires comme un danger pour tout leur secteur (voire, pour tout le pays, à les écouter).
Le plus amusant de l’histoire, c’est que ce sont à peu près les mêmes qui pensent qu’il faut trouver de nouvelles ressources pour revenir à un déficit du budget de l’état raisonnable et qui hurlent dès qu’on touche à leur nichette fiscale favorite. Objectivement, les deux mesures précitées ne peuvent pas être qualifiés de racket fiscal. La bulle spéculative sur l’immobilier ayant participé à la faillite actuelle, un alourdissement de la taxation sur les plus values (sur les résidences secondaires, faut-il le rappeler !) n’est pas scandaleux.Quant aux parcs d’attraction, alors que les parcs aquatiques sont soumis à la TVA normale de 19,6%, on se demande bien pourquoi ils bénéficient de la TVA à 5,5% depuis 1987 (petit calcul : on nous dit que la mesure rapporterait à l’état 90 millions d’Euros, soit un manque à gagner pour l’état d’environ 2 milliards depuis 25 ans…). Bizarrement, on parle beaucoup moins d’une mesure largement plus injuste : la CSG va s’appliquer sur 98% du salaire au lieu de 97%, ce qui va toucher tous les salariés.
Notre droit fiscal est truffé de niches fiscales, devenant incompréhensible et permettant aux plus fortunés de bénéficier d’optimisations fiscales les exemptant d’une grande part de leur contribution. Depuis 2000, la baisse des impôts est devenu l’alpha et l’oméga de toutes les politiques fiscales. On a organisé la paupérisation de l’état, et prétexté les déficits ainsi créés pour couper aveuglément dans les dépenses. Jamais pour mieux dépenser, mais pour moins dépenser. Ceci n’est pas de la bonne gestion. Un bon gestionnaire commence par recenser ce dont il a besoin, et met en œuvre les mesures pour avoir des ressources suffisantes pour combler ces dépenses. On en est loin. Les déficits sont toujours présentés comme des fatalités ou des horreurs diaboliques. Or, la santé a un coût, la justice a un coût, l’école a un coût, la démocratie a un coût (j’arrête là l’énumération, vous avez compris) et le devoir d’un gouvernement responsable n’est pas de dire « on coupe les dépenses », mais de collecter les ressources suffisantes pour remplir ses missions.
Et, bonne nouvelle, l’objectif contrairement à ce qu’on nous rabâche jour après jour, n’est pas innaccessible. Un retour à la fiscalité de 1999 (qui, soyons sérieux, n’était pas confiscatoire) résoudrait tous nos problèmes budgétaires. Mais cela nécessiterait, pour nos gouvernants actuels, de s’affranchir des ɶillères libérales dont ils se sont affublés.
Voilà déjà trois pistes :
- L’impôt sur le revenu doit redevenir progressif (12 tranches au lieu de 5) et sa tranche supérieure doit être relevée à 50% au lieu de 40 %
- Il n’y a aucune raison de maintenir le prélèvement libératoire sur les plus values financières, mais il faut les intégrer dans les revenus, pour que les plus gros revenus ne bénéficient pas d’une taxation sur le capital inférieur à celui du travail.
- Il n’y a qu’un moyen de lutter contre le championnat d’optimisation fiscale auquel se livre les plus hauts revenus : supprimer l’intégralité des niches fiscales ou, si on juge que certaines ont un intérêt économique fort, plafonner l’ensemble des niches fiscales à 2000 € par foyer fiscal.
Voilà, on ne peut pas répéter tous les quatre matins que la situation est catastrophique et vouloir que rien ne change. Pour des raisons strictement idéologiques, c’est la fête fiscale pour les foyers les plus aisés depuis dix ans. Il est plus que temps de siffler la fin de la récré et revaloriser l’image de l’impôt auprès de nos concitoyens. Rendre la fiscalité plus simple, plus lisible et donc plus juste, est le bon moyen de le faire.
Dans le genre, aujourd’hui même : abandon de la taxe sur les parcs à thèmes. « Le bon sens l’a emporté », nous dit Philippe De Villiers ! C’est cela, oui…
Et une partie de l’UMP gueule contre la hausse de la taxation sur les plus values immobilières. Il va rester que la taxe sur le coca…
Même pas sûr qu’elle survive, celle là ! « Mais que vont boire nos enfants ??? », pour reprendre les mots d’une mère de famille paniquée. Pour peu qu’elle et ses semblables soient électrice UMP…