Danse, danse, danse. Haruki Murakami

Il y a un peu plus de dix ans, on m’a offert Chroniques de l’oiseau à ressort de Haruki Murakami. Je n’avais alors rien lu de cet auteur, n’en connaissais même pas le nom. Je n’étais pas spécialement attiré par le Japon.

Ce fut un coup de foudre, et, depuis, j’ai lu l’intégralité de sa bibliographie traduite en Français (ses deux premiers romans ne sont malheureusement pas traduits, je suis étonné que Belfond, son éditeur actuel,  ne profite pas du succès actuel de l’auteur pour vendre du papier avec ses romans de jeunesse…).

Danse, danse, danse, est donc le seul roman de Murakami que je n’avais pas encore lu. C’est la suite directe de La course au Mouton sauvage, mais ces deux romans forment chacun un tout et l’on pourra lire l’un ou l’autre indépendamment, les éléments du premier nécessaires à la compréhension du second étant largement expliqués.

Ce que j’aime beaucoup dans Murakami, et qu’on trouve dans Chroniques de l’oiseau à ressort (je trouve que c’est une chance d’avoir commencé par celui-ci), c’est l’irruption d’événements complètement barrés dans le quotidien extrêmement banal du personnage principal. Un quotidien que l’auteur nous fait partager, on voit ce personnage se faire à manger, faire ses courses et son ménage. Ce personnage est souvent célibataire ou divorcé, un peu psychorigide, et il se raccroche à ces rituels du quotidien pour essayer de ne pas sombrer avec son environnement qui se délite totalement. Voilà, ça pourrait être le schéma directeur de certains romans romans de Murakami, mes préférés en tout cas, et Danse, dans, danse, est tout à fait sur ce schéma-là.

Le narrateur, rédacteur free-lance, fait une pause professionnelle, pour retourner à l’Hôtel du Dauphin, avec lequel il sent bien qu’il a encore des choses à régler (cet hôtel est au centre de la Course au Mouton Sauvage). En arrivant devant l’établissement, il constate avec surprise que le petit hôtel miteux a disparu et a été remplacé par un établissement luxueux. Son quotidien bien réglé ne va alors cesser de déraper. Il retrouve un ami du temps de ses études, devenu acteur à succès ; il rencontre une gamine pour le moins instable pour qui il va essayer de jouer le rôle de parent de substitution ; il est mêlé, indirectement, au meurtre d’une call-girl… Un véritable tourbillon, dans lequel il essaie de maintenir un semblant de stabilité.

L’écriture simple, précise et ciselée de Murakami est pour moi une source de plaisir immense. Je pense que le fait que le quotidien « normal » du narrateur soit malgré tout exotique pour moi, parce que c’est un quotidien dans un Japon que je ne connais absolument pas, amplifie encore le charme.

Inutile de chercher des réponses dans les livres de Murakami, Danse, danse, danse, n’est pas un polar. On n’aura aucune certitude sur le ou les meurtriers, aucune certitude sur qui se cache derrière les promoteurs mystérieux de l’hôtel. Un roman de Murakami est un voyage, un voyage pour le plaisir de voyager et non pas pour sa destination.

Roman traduit du Japonais par Corinne Atlan
Paru au Seuil
(dispo en poche chez Points)

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