Quel que soit le résultat de la primaire ce soir, et celui de la semaine prochaine, le grand vainqueur sera le parti Socialiste. Aujourd’hui, à peu près toute la sphère médiatique le reconnait.
La seule réserve que l’on lit ici ou là est que l’exercice, contrairement aux apparences serait un recul démocratique parce qu’il enlèverait aux partis la capacité de désigner ses représentants, et par ricochet, affaiblirait les partis, qui sont censés être le creuset des idées de demain. La faiblesse de cet argument réside justement dans le « censés ». Il y a belle lurette que les partis politiques, en France, et le parti Socialiste en particulier, ont perdu leur rôle de « machine à penser ». Alors, faut-il s’accrocher à une idée mythique du parti politique pour refuser le processus des primaires ? Je pense que non.
Pourtant, il y a six mois encore, le scepticisme était plutôt la règle. Le PS allait étaler ses déchirements au grand jour, on doutait parfois de la légalité même de cette consultation, la calendrier n’était pas le bon. Bref, dans un grand élan moutonnier dont nos médias main stream sont coutumiers, l’heure était à la raillerie. C’était l’époque où l’UMP cherchait tous les moyens pour faire échouer ce scrutin (recours devant le conseil d’état, chicaneries des municipalités de droite à propos de l’organisation concrète du scrutin…).
Aujourd’hui, dans un mouvement de balancier inverse, les éditorialistes rivalisent de superlatifs pour qualifier la primaire. Quant à la droite, elle sent bien qu’en 2017, elle ne pourra pas elle-même y échapper.
Le retrait involontaire de DSK de cette primaire a été, il faut le dire, un facteur déterminant de succès. Présenté comme élu d’avance, DSK, en étant obligé de se retiré, a ouvert le jeu. Et même si les sondages truqués (je me suis déjà largement expliqué là dessus, je maintiens, et je n’y reviens pas) ont voulu nous faire croire qu’un autre favori émergeait, les autres candidats ont eu plus d’espace médiatique. Et les trois débats télévisés ont été plutôt largement regardés.
Il reste deux points qui peuvent faire définitivement basculer cette primaire vers un succès retentissant, et rendre l’exercice incontournable dans le futur : la participation et le résultat.
La participation : quand le processus a été mis en place, personne n’osait rêver d’un million de votants. S’il y en a deux ou trois fois plus, comme on le dit parfois, c’est un quasi raz de marée, et ça crée une dynamique pour la ou la candidate. De façon aussi scientifique que les sondeurs, je peux dire qu’au vu du nombre de bulletins dans l’urne au moment où je suis allé voté (un peu avant 11h), ça s’annonce très bien de ce point de vue.
Le résultat : je crois (et surtout, je veux croire !), que le résultat va être une énorme surprise par rapport aux sondages des dernier jours, et pas seulement par rapport aux favoris proclamés selon des enquêtes n’ayant rien à voir avec le scrutin. Dans ce cas, dont on rediscutera dans quelques heures, le scrutin sera d’autant plus légitime qu’il contredira l’évidence médiatique. Une sorte de victoire de la démocratie sur l’intoxication quotidienne des grands médias. On peut toujours rêver, non ?
Et sur le fond ? Si je mets de côté Baylet, qui est là pour faire exister autant que faire se peut son groupuscule, on a trois candidats assez proches sur le fond (Royal, Hollande, Aubry), en gros : en ligne avec le programme adopté par le PS, et deux francs-tireurs, l’un plus à gauche (Montebourg, le plus convaincant sur les institutions), l’autre – beaucoup – plus à droite (Manuel Valls, un nostalgique de Tony Blair, alors que le Blairisme a été un échec patent). Entre les trois premiers cités, selon moi, une seule se détache en terme de force de conviction, c’est Martine Aubry. L’exaltation de Royal, son côté « Madonne qui a eu la révélation », m’exaspère. Quant à Hollande, je le sens prêt à enfiler les habits du parfait gestionnaire qui va vite oublier son courage au nom des grands équilibres. Il n’est pas certain que Martine Aubry arrive, elle, à dépasser cette inertie peut-être inhérente au pouvoir, mais je pense que c’est celle qui est la mieux armée pour le faire. Je crois qu’elle croit à ce qu’elle dit, alors qu’Hollande est dans un exercice de communication destiné à conquérir le pouvoir, pour le pouvoir, par pour en faire quelque chose. On en reparle ce soir…
Intéressante cette coquille sur les partis « censés » être les machines a penser
Ne serait-il pas plutôt les censeurs des idées nouvelles ?
Et au lieu de donner du sens ne cherche t’il pas a faire sensation ?
Arf, bien vu. Je corrige !!! L’erreur, d’ailleurs, elle était sur sensés et non sur censés
« ça crée une dynamique pour la ou la candidate »
—> on voit tout de suite pour qui t’es ! 🙂 (Royal ? niark)
Sinon, par rapport à ce que tu dis au début du billet, on a reproché encore hier soir au PS d’accepter par ce processus la présidentialisation de la vie politique française. Ben j’ai envie de dire qu’il était peut-être temps !
(de toute façon, c’était pas un triomphe, 2 millions de votants, c’est jamais que 4% de la population – comme ils disent à l’UMP. Mouarf…)